Pourquoi voyager pour photographier ?
Un jour quelqu’un m’affirma, avec beaucoup de gravité, qu’il n’y avait nul besoin de parcourir le monde pour réaliser de bonnes images et cette affirmation a accompagné mon esprit jusqu’au jour où j’ai enfin compris qu’elle n’avait pas la valeur absolue qu’on avait voulu lui donner, et n’était valable que pour certains types de photographies.
En ce qui me concerne, m’intéressant en priorité aux êtres humains, je pratique surtout la photographie en voyage car le déplacement vers des sociétés différentes me procure une sensation de liberté qui me paraît favorable à la prise de bonnes images.
Les sociétés établissent toujours des normes régissant les rapports entre les uns et les autres et déterminant ce qui peut devenir « public », c’est-à-dire, dans notre cas, ce qui peut être librement photographié. Dans son pays d’origine, le photographe est censé observer ces normes qui, même s’il ne les respecte pas, demeurent présentes à son esprit et seul un caractère transgressif (que je ne possède pas) ou un événement exceptionnel peuvent faire sauter ces verrous.
En voyage, en revanche, aidé par la méconnaissance des règles locales, je me libère de ces inhibitions et peux choisir mes sujets sans arrière-pensées, surtout si les habitants que je rencontre, devinant mon ignorance, ne se sentent pas obligés de me les rappeler et se laissent prendre au jeu.
Cela me permet de rencontrer les hommes et les femmes à l’état naturel, sans qu’aucune règle ne vienne ternir la sympathie simplement humaine qui favorise notre rencontre.
Leur consentement génère alors des situations sans fard dans lesquelles mon appareil peut saisir des images empreintes de véracité.
Coucou Consuelo,
C’est aussi parce que tu es une aventurière dans l’âme.
Partir en voyage pour toi, c’est entrer dans l’inconnu alors que pour d’autres, les touristes, c’est aller vérifier ce qu’ils ont vu et lu dans leurs guides,
Je reprends ici dans un certain « à peu près » des propos tenus par Sylvain Tesson au sujet du voyage.
Je voyage peu et photographie encore moins mais je comprends ce que tu ressens. La méconnaissance des règles locales par la permission tacite accordée aux étrangers de n’avoir pas à les respecter à la lettre, nous fait flotter dans un air de liberté. La personne photographiée, elle, reste ce qu’elle est, enserrée dans une culture plus ou moins accessible et malheureusement, plus ou moins libre.
Il reste qu’un sourire, une larme, un baiser… sous toutes les latitudes est traduisible par chacun. Ce bout d’âme capturé par l’objectif est un cadeau que nous font ces mimes marceau aux 4 coins de la planète… sans oublier que le coin de la rue fait aussi partie de la planète.